Le vintage n’est pas la seconde main!

Et pourquoi il est écologiquement important de ne pas les confondre.

Alors que le vintage est notre plus belle opportunité pour réduire les émissions de gaz à effet de serre du secteur textile, la seconde main issue de fast-fashion brouille les pistes et encourage la surproduction de vêtements neufs

Quand nous avons lancé Imparfaite il y a bientôt 5 ans, nous n’étions que deux fans de vintage qui n’avaient plus le temps de chiner et cherchaient une solution simple pour avoir accès au stock de nos plus belles adresses vintage. Depuis, nous avons été, comme beaucoup de personnes, sensibilisées à la cause écologique, et notre vision de la mode a beaucoup évolué. Imparfaite nous a permis de découvrir l’envers du décor de la production de vêtements et du recyclage. On a également vu cette tendance de la seconde main émerger ces cinq dernières années. Alors que certaines personnes de notre entourage nous croyaient folles de “travailler dans la fripe”, aujourd’hui, acheter du vintage est entré dans les moeurs et n’a plus cette connotation d’achat de nécessité mais plutôt celle de l’achat de connaisseu.se.r. Cette tendance est si forte que des grandes marques, bastions de la fast-fashion et de la production de neuf, s’y mettent aussi. Nous voyons évidemment cela d’un œil positif, il faut que les grands groupes, principaux pollueurs, se remettent en question et soient capables de prendre la parole sur ces sujets pour mobiliser la majorité des femmes et des hommes. Cependant dans ce nouveau contexte où tout le monde se veut défenseur de la cause écologique, il est souvent très difficile de déceler le vrai du faux et de garder son sens critique pour percevoir les tentatives de greenwashing

L’important est d’arrêter de produire autant de vêtements neufs.

La seule chose à retenir est qu’il faut arrêter de produire autant de nouveaux vêtements si on veut avoir une chance de limiter l’impact écologique du secteur textile. “Produire c’est polluer” comme le dit justement En mode climat et Julia Faure. C’est aussi simple que cela. Pour tenir les accords de Paris et limiter le réchauffement climatique, il faudrait que le secteur textile divise par trois ses volumes de production d’ici 2050. On n’en est encore très loin et la tendance ne va pas dans le bon sens, vu qu’on produit deux fois plus de vêtements qu’il y a 15 ans*…Le textile est l’un des secteurs les plus polluants au monde, au delà de la pollution des eaux, il émettrait 1,2 milliards de tonnes de gaz à effet de serre par an selon l’Ademe*.  +100 milliards d’unités de vêtements sont produits chaque année, pour une population mondiale de moins de 8 milliards de personnes, dont plus de la moitié n’achète pas de neuf depuis longtemps pour des raisons économiques… Le problème est que, malgré ce que l’on pense, c’est la phase de production du vêtement qui est la plus émettrice de gaz à effet de serre dans le cycle de vie d’un produit**. Beaucoup de gens pensent que c’est le transport, alors que cela ne représente qu’une toute petite part du mix (entre 1 et 3% des émissions**). Là où on consomme le plus d’énergie est lors de la production des matières premières nécessaires (52%**) , puis lors de la manufacture (tissage, assemblage etc) qui pèse pour 43% des émissions du secteur**. La raison est que ces étapes sont majoritairement faites en Asie, là où les machines tournent encore à des énergies fossiles polluantes, comme le pétrole ou le charbon.

Pour protéger notre planète, il est donc primordial…

1/ d’arrêter de produire de manière effrénée tout et n’importe quoi 

2/ de relocaliser la production de vêtements en Europe et notamment en France, là où les énergies sont plus propres et moins émettrices de gaz à effet de serre.***

Ainsi, lorsque vous voyez une marque qui lance un plan “recyclage green” en vous proposant de reprendre une pièce ancienne de la marque contre un bon de réduction sur une collection de neuf, on peut vous garantir que c’est un cas classique de greenwashing, puisque, sous couvert d’écologie, on vous pousse à acheter du neuf (alors que c’est exactement ce qu’il faut endiguer) Dans ce contexte, acheter seconde main apparaît être la solution magique puisque cela n’entraîne aucune nouvelle production. Oui, mais….

Vintage vs. Seconde main: Quelles sont les différences? 

La seconde main désigne un vêtement revendu par un acteur qui n’est pas son producteur. Dans la grande majorité des cas, ce sont des vêtements d’occasion et ils ont été déjà été portés. Ils peuvent être anciens ou récents, portés une seule fois ou pendant plusieurs années, par une seule personne ou par plusieurs propriétaires successifs. La seconde main est donc le contraire du vêtement neuf, tout simplement.

Le vintage est une sous-catégorie de la seconde main, car elle doit en plus avoir été produite il y a au moins 20 ans. Certains disent 15 ans d’autres 30 ans…Généralement, on s’accorde pour dire 20 ans, le mot vintage étant très probablement un dérivé de “vingt” en latin (on n’est pas étymologistes, on n’arrive pas à trouver une source fiable à ce sujet mais cette théorie a l’air plutôt cohérente selon nous…).Un vêtement devient donc vintage avec le temps qui passe. Les années 2000 par exemple, sont maintenant vintage et on voit un retour des pièces emblématiques de notre enfance (du moins la nôtre!)

Contrairement à la seconde main, le vintage sous-entend l’authenticité, qualité et savoir-faire. Alors que l’achat de vintage a longtemps été socialement mal perçu, ces dernières années ont complètement changé la donne. Acheter vintage requiert une certaine connaissance de la mode pour reconnaître une véritable pièce vintage (style, coupe, caractéristiques, composition) et ne pas tomber dans les pièges classiques (les tailles ne sont plus les mêmes, déceler les faux etc) Malheureusement le mot “vintage” est très souvent utilisé à mauvais escient dans la presse, la pub ou sur les réseaux sociaux. Des acteurs de toute sorte, incluant des grandes marques,  utilisent à tort ce mot pour désigner une pièce récente d’occasion. La raison est simple: aucune loi ne régit l’utilisation du mot “vintage” et ça sonne mieux, plus cool, que “seconde main”. Dans le meilleur des cas, c’est une maladresse ou une erreur, dans le pire, c’est du greenwashing… on vous laisse en juger selon les cas. Le problème de cette confusion?  En terme d’écologie, la seconde main et le vintage, ce n’est pas du tout la même chose…

Pourquoi la seconde main non vintage n’est pas forcément écologique?  

Depuis quelques années, nous avons pu assister à l’explosion des plateformes de seconde main, particulièrement en France. Acheter seconde main au lieu de se ruer sur du neuf est évidemment une bonne chose et il faut se féliciter que de plus en plus de gens achètent d’occasion. Mais cette pratique a malheureusement des effets très pervers…A peine achetés, les vêtements sont de plus en plus rapidement revendus sur des sites de seconde main qui nous encouragent à faire de la place dans nos placards pour acheter de nouveau (le fameux “Tu ne le portes plus, vends-le!”) En donnant de nouveaux débouchés à des produits de fast-fashion, ces plateformes encouragent à acheter sans compter dans ces enseignes à très bas prix, pour les revendre quasiment instantanément. Ainsi, au lieu de réduire les productions de vêtements en les remplaçant par de l’occasion, ces plateformes font tout le contraire et encouragent la surconsommation de vêtements neufs. Il semblerait donc que fast-fashion et seconde main se nourrissent l’une de l’autre. Si la seconde main était vraiment un remplacement de l’achat de neuf, on devrait s’attendre à un recul des parts de marché de la fast fashion au profit de ces plateformes qui cartonnent. C’est tout le contraire qui se passe…Ces 2 dernières années ont été le témoin de la très forte croissance à la fois de nombreuses plateformes de seconde main ainsi que de la fast-fashion, notamment avec l’arrivée de SheIn. Alors qu’elle était quasiment inconnue il y a 2 ans, on peut compter plus de 7,6 millions de produits de cette marque sur le plus gros site de seconde main de France aujourd’hui…

Fast-fashion et seconde main se nourrissent l’une de l’autre

Acheter de la seconde main récente peut donc être aussi nocif que d’acheter du neuf, car cela encourage les achats compulsifs chez les acheteurs de neuf. Au lieu de réduire les productions de vêtements en les remplaçant par de l’occasion, ces plateformes font tout le contraire et agissent comme des catalyseurs. C’est pour cette raison que chez Imparfaite, nous nous employons à ne remettre en circuit que des pièces vintage c’est-à-dire anciennes. Acheter vintage n’encourage en effet aucune marque à produire davantage et c’est ce qui nous encourage tous les matins à poursuivre cette aventure.

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